CHAPITRE VIII
Vaisseau-monde yuuzhan vong, orbite de Coruscant
Maal Lah s’arrêta devant la barrière qui bloquait l’accès de la salle. Il regarda le garde qui l’avait conduit jusque-là, comme pour lui demander s’il s’était trompé, mais le soldat évita tout contact visuel. Soit il avait peur de regarder un supérieur dans les yeux, soit il savait ce qui attendait Maal au-delà de la barrière.
Maal Lah, lui, l’ignorait.
A son approche, la barrière se rétracta comme la mâchoire d’un poisson.
Maal avança.
La salle était un lieu de connaissance et d’apprentissage. La raie spinale traceuse était un proche parent de la raie spinale provocante, capable de suivre les trajets neuraux de certaines pensées et d’y ajouter des ondes de souffrance. Ainsi, les sujets étaient dressés à ne pas répéter ces pensées.
Les fonctions de la traceuse étaient autres. Elle déterminait l’efficacité de la transmission des signaux le long des synapses et induisait la douleur avec une précision nanométrique, pour découvrir quels tissus étaient restés malades une fois la guérison apparemment terminée.
La bioluminescence qui régnait dans la salle se reflétait sur des coraux noirs et rouges, rappelant d’épaisses couches de sang. Au centre était installée une table au plateau ovale et une des extrémités de la raie spinale traceuse touchait le sol. Un membre de la caste des modeleurs se tenait à côté.
Tsavong Lah y était allongé. Il avait gardé ses vêtements, mais son bras gauche nu reposait sur la surface de cuir de la table. Maal Lah savait que la visite du maître de guerre était purement médicale. La raie spinale devait évaluer la condition de la pince radank fixée à son bras. La plaie ne semblait pas s’être aggravée depuis la dernière fois que Maal l’avait vue, mais elle ne s’était pas améliorée non plus.
Le maître de guerre voulait-il que Maal puisse témoigner de l’état de son bras, coupant court aux spéculations sur un rejet de la greffe ?
Tsavong Lah lui jeta un bref coup d’œil. Le modeleur fit un pas sur le côté pour les laisser parler, mais Maal Lah le sentit à l’écoute.
— J’ai besoin de tes conseils, mon serviteur, déclara Tsavong Lah. De ton interprétation. (Maal Lah acquiesça en silence. Il préférait se taire. Ceux qui parlaient finissaient toujours par en dire trop et s’attiraient la colère du maître.) J’ai envoyé la flotte de Wyrpuuk Cha à Borleias pour reprendre la planète aux infidèles. Nous pensions que la garnison était prête à se sacrifier… Mais c’était un piège. Nos adversaires ont fait montre d’une précision, d’un courage et d’une sauvagerie inhabituelle. Leur plan a été brillamment exécuté. Leur plus gros vaisseau, dont nous ignorions la présence, est soudain apparu au sein de la formation de Wyrpuuk Cha et a détruit les deux yammosks. Il a ensuite servi d’appât, attirant les autres navires de notre flotte et permettant aux ennemis de fondre sur nous avant que nous les détections.
Le maître de guerre marqua une pause avant de reprendre :
— Notre flotte est presque détruite. Le successeur de Wyrpuuk Cha nous ramène les survivants… Au moins la plupart, car un pilote du Domaine Kraal a convaincu certains de rester et de harceler les infidèles. Bien sûr, ces pilotes ont désobéi à un ordre du successeur désigné en choisissant de rester sur le champ de bataille… J’ai déterminé un plan d’action, mais je veux savoir ce que tu penses de la situation.
Maal Lah resta silencieux un moment. Il ne fallait pas proposer d’idées à la légère.
— Si l’embuscade était si précise, répondit-il enfin, elle a sans nul doute été conçue par leur plus grand tacticien, Garm bel Iblis.
— Non. Bel Iblis est aux commandes d’un autre groupe, qui patrouille ailleurs. Les vaisseaux du système de Pyria appartiennent à Wedge Antilles.
Maal Lah se tut de nouveau, comme s’il réévaluait la situation.
— J’ai besoin d’analyser les rapports des survivants. Mais il me semble évident que Bel Iblis a planifié l’embuscade. Ce qui signifie qu’il travaille avec Wedge Antilles. Donc que ce site est d’une importance extrême. Nous devons apprendre pourquoi. Puis nous le détruirons avec une telle violence que les infidèles qui s’étaient réjouis de leur victoire ne pourront plus prononcer le nom de Borleias sans une grimace de douleur…
— Oui.
— Vous devrez mener la conquête de Borleias en personne.
Tsavong Lah secoua la tête.
— Impossible. D’autres problèmes exigent mon attention. Mais tu as raison. Il faut un maître de guerre.
Maal Lah resta songeur. Puis, comprenant enfin ce où Tsavong voulait en venir, il se raidit.
— Il refusera.
— Non.
— C’est le meilleur choix. S’il accepte.
— Affrète un vaisseau et calcule une trajectoire pour le Domaine Lah.
— Ce sera fait.
Maal Lah se retourna, puis partit. De vieilles cicatrices, sur son dos, le brûlèrent soudain.
Des cicatrices qu’il devait à celui à qui Tsavong Lah allait rendre visite…
Quand Maal Lah fut sorti de la salle, le maître de guerre fit un signe au modeleur.
— Quelles sont vos conclusions ?
Le maître modeleur Ghithra Dal prit un moment pour formuler sa réponse.
— Aucun signe de changement. Le tissu où la pince radank rejoint votre chair continue à pourrir… et à guérir.
— Aucun signe de rejet des autres implants ?
— Aucun.
— A votre avis, ça signifie quoi ?
— Je l’ignore.
— Quand les connaissances font défaut, il vous reste l’instinct et l’intuition. C’est ce que je veux. N’ayez pas peur de ma réaction. Je sais faire la différence entre les faits et les opinions.
— Si je devais émettre une opinion, maître de guerre, je dirais que la cause de cette maladie n’est pas le manque de talent des modeleurs… mais la volonté des dieux.
Tsavong Lah faillit frissonner. Une pièce de plus dans le puzzle. Un élément de plus, confirmant l’hypothèse de Viqi.
— Quels dieux ? dit-il avec une douceur dangereuse.
Ghithra Dal pencha la tête, comme s’il hésitait.
— Tous les dieux peuvent ainsi manifester leur colère. Mais je pense à Yun-Yuuzhan. Si je puis me permettre…
— Ne craignez rien, Ghithra Dal, et faites votre suggestion.
— Je recommanderai que vous parliez aux prêtres. Demandez-leur qui, parmi les êtres supérieurs, est en colère contre vous. Votre question concerne les prêtres, pas les modeleurs.
Sauf quand les prêtres sont de mèche avec les modeleurs.
Quelle sera ta récompense, Ghithra Dal ? Une partie du monde obtenu par les prêtres de Yun-Yuuzhan ? Un continent ?
— Je vais réfléchir, dit le maître de guerre en se levant.
Et demander un deuxième avis. Celui de quelqu’un qui parle comme un modeleur… mais dont la loyauté ne va pas à leur ordre.
Je vais parler à Nen Yim.
Occupation de Borleias, onzième jour
Luke Skywalker était assis en tailleur sur le sol de la soute du Faucon Millenium. Un des rares endroits où il pouvait être seul et où ses méditations ne risquaient pas de faire pleurer son fils.
Il s’ouvrit à la Force sans penser à la question à laquelle il espérait répondre.
La réflexion était mauvaise pour l’intuition.
Mais cette fois, les courants de la Force ne l’emportèrent pas là où il voulait aller.
Il sentait l’influence du Côté Obscur.
Le côté sombre de la Force ne l’attendait pas, ne l’accueillait pas. Ses buts n’étaient pas ceux de Luke.
Un instant, le Jedi sentit que le mal errait toujours sur Coruscant.
Yan Solo regardait sa femme renaître à la vie.
La disparition d’Anakin et de Jacen avait détruit Leia. La mort de ses fils l’avait convaincue que tous ses efforts avaient été inutiles. Quand elle avait mesuré son erreur, au moins intellectuellement, les difficultés de leur fille Jaina dans le système de Hapès lui avaient rappelé ses devoirs.
Elle avait agi avec rapidité et efficacité, comme toujours, mais sans l’enthousiasme et l’humour que Yan aimait tant.
A tout moment, ses pensées pouvaient revenir à Anakin – centrées sur ses souffrances et sa mort à bord du vaisseau-monde yuuzhan vong, au-dessus de Myrkr. Ces réminiscences lui coupaient le souffle et la firent pâlir, et elle se réfugiait dans les bras de Yan ou se recroquevillait jusqu’à ce que la peine s’atténue.
Yan aussi souffrait, mais il essayait de ne pas le montrer. Il voulait aider Leia. Ne pas l’abandonner comme il l’avait fait après la mort de Chewie.
Aujourd’hui, Leia était scotchée à son databloc, relié aux bases de données de différents vaisseaux et à leurs archives personnelles du Faucon Millenium et du Rêve Rebelle. Elle établissait une liste de politiciens qui lui devaient des faveurs, réactivant les mesures mises en place avec les fondateurs de l’Alliance Rebelle plus de vingt ans auparavant.
Ce faisant, son enthousiasme revint. Le chagrin restait présent, aussi fort, mais quand elle l’oubliait – quelques instants seulement – elle paraissait plus énergique et vivante.
Plus elle-même.
Yan était heureux de ce changement sans vraiment le comprendre. Après tout, cela faisait des années qu’elle se chargeait de ce travail…
L’exclamation de Leia le tira de sa réflexion.
— Qu’est-ce qui s’est passé ?
Yan se tourna vers elle. Leia regardait l’espace vide, autrefois occupé par le fauteuil de Chewbacca.
— Je fais installer un siège plus à ta taille.
Yan dissimulait son émotion. Retirer le fauteuil de son ami – un des derniers souvenirs concrets du Wookie – avait été une des épreuves les plus difficiles qu’il ait dû affronter.
— Tu as fini de réorganiser la galaxie ?
Leia secoua la tête et s’approcha.
— Encore quelques systèmes à déplacer et j’aurai terminé le nettoyage de l’amas de Hapès…
— Il en aurait bien besoin, dit Yan en la serrant contre lui.
— Nous pouvons commencer par Isolder, le grand fauteur de trouble…
Mais Leia avait les yeux rivés sur l’écran du Faucon.
— Yan… qu’est-ce que c’est ?
— Coruscant.
— Je vois bien que c’est Coruscant. Mais que fais-tu ?
Yan haussa les épaules comme s’il ne connaissait pas la réponse… Une technique éprouvée de « temporisation » pendant qu’il réfléchissait à un mensonge possible. Il n’en trouva aucun susceptible de tromper Leia.
— Ce sont les jumeaux, dit-il enfin. Les jumeaux sont sacrés… pour les Yuuzhan Vong. Ils pensent que Jacen et Jaina ont une signification particulière d’un point de vue religieux… Ce qui veut dire, si tu as raison et que Jacen est vivant, qu’il est entre les mains de l’un des Vong les plus importants. Or le vaisseau-monde de leur haut commandement est en orbite au-dessus de Coruscant. Pas besoin d’être un génie pour deviner que Jacen est soit sur Coruscant, soit sur ce vaisseau-monde…
— Tu ne vas pas aller le chercher…
— Je pourrais, dit Yan.
J’irai, pensait-il.
— Yan, non… écoute-moi. Tu ne peux pas l’aider. Si tu y vas, je vais te perdre aussi…
— Je suis aussi difficile à perdre qu’une mauvaise réputation.
Leia ne répondit pas. Ni en le raisonnant, ni en l’insultant. Un signe de plus de son trouble.
— Tu dois comprendre, dit-elle enfin. Je ne vois pas les Yuuzhan Vong dans la Force. Idem pour Jacen… Mais je ne suis pas coupée de la Force. Elle me montre certaines choses. J’ai des visions. Et quand je nous vois retourner sur Coruscant, c’est pour échouer. Et pour mourir.
— Quelqu’un doit y aller, dit Yan, glacé par le ton de sa femme.
— Luke. Luke peut le faire. Il a une chance. Pas nous.
Leia se recroquevilla sur son siège, comme si accepter qu’elle ne pouvait pas aider son fils la blessait physiquement.
Puis elle se redressa.
— Tu ne peux pas aider Jacen, mais tu peux m’aider, moi, dit-elle.
— Comment ?
— Grâce à la politique.
— Tu sais ce que je pense de la politique. Et tu connais mes talents en ce domaine.
Leia sourit.
— La résistance veut créer un nouveau genre de politique. Quand un type te sourit et s’apprête à te poignarder dans le dos, tu l’abats au lieu de lui sourire en retour…
— Vraiment ? On tire une fois ou autant qu’on veut ?
— Tant que la batterie du blaster fonctionne.
— Ça a l’air bien. Où est le hic ?
— J’ai accepté le travail dont parlait Wedge l’autre soir. Il ne me manque que ton accord. Une fois le plan finalisé, nous passerons de système en système installer des cellules de résistance. Une extension du réseau Jedi, pour chatouiller les forces vong et les Brigades de la Paix.
— Et leur tirer dessus ?
— Oui.
Yan hésita à demander si Leia était certaine de sa décision… Voulait-elle vraiment faire ça alors qu’un de leurs enfants avait disparu et que l’autre se débattait dans des circonstances inconnues sur un monde hostile ?
Mais dans la tourmente, malgré la douleur et l’incertitude, Leia était à son meilleur.
Elle était de retour.
— Je signe, madame.
— Bien. Nous avions besoin d’une crapule.
— Je n’ai plus à jouer au gentil ?
Secouant la tête, Leia se pencha pour l’embrasser… quand la voix de C-3PO retentit derrière eux.
— Maître Solo ! Le mécanicien est arrivé avec le nouveau fauteuil de copilote…
Yan et Leia sursautèrent.
— Si je suis une crapule, je peux abattre cet imbécile doré ? chuchota Yan.
Sa femme secoua la tête.
— Non, désolée…
— Alors, c’est ça, le hic ?
— C’est ça, le hic !
D’un sursaut, Danni Quee se redressa dans son fauteuil. Quelques secondes passèrent sans qu’elle se souvienne de ce qui l’avait tirée du sommeil. Puis le bruit recommença.
On frappait à la porte.
— Entrez, dit-elle en repoussant les mèches plaquées sur son visage.
La porte s’ouvrit et Tam Elgrin apparut, les mains tendues devant lui comme s’il ne savait pas où les mettre. Puis il les posa sur ses hanches et enfin croisa ses bras… La porte se referma sur lui, détecta l’obstacle et s’ouvrit de nouveau.
— Tam. Bonjour. J’ignorais que vous aviez le droit de vous balader dans ce secteur…
Avec un sourire maladroit, Tam désigna la puce d’identification, sur sa veste.
— Je… je fais des réparations pour le groupe civil. Alors j’ai l’autorisation d’accès.
— Ah.
— Vous avez quelque chose à réparer ?
La porte essaya encore de se refermer. Tam l’ignora.
Danni secoua la tête.
— Pas vraiment. J’essaye de faire ma propre maintenance.
— Oh… d’accord. Si jamais… Si vous avez besoin de quoi que ce soit… Je suis là.
— Très bien.
Tam attendit un cycle de fermeture de la porte de plus avant de s’aviser que la conversation était probablement terminée.
— Je peux… Je peux aller vous chercher quelque chose ? A boire ou à manger ?
— Non, merci. Et… merci.
— Bon. Ben j’y vais.
— Au revoir.
— Au revoir.
L’expression de Tam changea, passant de la perplexité à la douleur. Reculant, il se frotta la tempe.
— C’est ce mal de crâ…
La porte se referma, lui coupant son dernier mot.
Danni se laissa retomber dans son fauteuil. La troisième fois en trois jours que Tam essayait, à sa manière inimitable d’engager la conversation. Il s’intéressait à elle… et honnêtement, c’était la dernière chose dont elle avait besoin.
Oh, Tam n’était pas repoussant… Mais le travail de Danni – l’analyse des technologies yuuzhan vong – passait avant tout. Il y avait ses exercices pour apprendre à se servir de la Force et ses missions en compagnie des Chevaliers Sauvages. Sans compter les réunions du Cercle Intérieur et les longues conversations que Danni menait avec toutes les personnes susceptibles d’apporter une pierre à l’édifice par leurs connaissances des « technologies » vong. Comme Cilghal, la guérisseuse Jedi calamarienne.
A cause de sa rareté, le sommeil était devenu le loisir préféré de Danni. Elle n’avait pas le temps de s’intéresser à tous les pilotes, officiers, techniciens et civils qui imaginaient qu’elle brûlait d’envie d’aller boire un verre avec eux.
Mais Tam était pire. Il la regardait avec de grands yeux remplis d’une émotion qu’elle ne comprenait pas. Ce n’était pas de l’amour, de l’affection ou de l’admiration… C’était… quelque chose comme du désir, mais pire.
Si Danni s’était écoutée, elle aurait penché pour du désespoir.
Elle se frotta les yeux pour se concentrer et retourna à ses instruments.
Iella se préparait à aller au lit.
— Wedge ? Avez-vous une raison de vous méfier de Luke et Mara, toi ou Tycho ?
Wedge s’allongea sur le lit et soupira, anticipant le mal de tête qui l’agressait chaque soir.
— Bien sûr que non, pourquoi ?
— Il y a deux jours, j’ai trouvé une puce de transmission dans les quartiers des Skywalker. Du boulot d’amateur… Elle était fixée à une conduite d’eau, dans leur unité de rafraîchissement. Bref, elle pouvait capter les conversations dans une cabine monoplace et uniquement quand l’eau ne coulait pas.
Wedge lui jeta un regard amusé.
— Nous sommes espionnés par quelqu’un qui n’a pas vu assez d’holopolars.
Iella se glissa auprès de lui.
— Et aujourd’hui, j’ai trouvé le récepteur correspondant dans les quartiers de Tycho.
Wedge gloussa.
— Tu penses que Tycho a envie de s’amuser à écouter les pleurs d’un bébé quatorze heures par jour ?
— Non. Mais je prends le problème au sérieux parce que je ne sais pas ce qu’il signifie. Quand je trouve les traces du travail d’un agent compétent, je sais comment réagir. Mais ça… ça m’énerve.
— Peut-être que notre ennemi a deux récepteurs. Un pour écouter et l’autre pour essayer de faire porter le chapeau à Tycho.
— Bonne suggestion.
— Alors, qu’as-tu fait ?
— J’ai laissé le transmetteur et j’ai prévenu Luke et Mara. Je vais leur concocter un petit scénario à déclamer dans le rayon d’écoute et on verra bien ce qu’il en ressort.
— Problème réglé, dit Wedge en tendant le bras pour éteindre la lumière.
Occupation de Borleias, quinzième jour
Cela faisait presque une semaine que le Lusankya avait écrasé la flotte yuuzhan vong. Depuis, des escadrilles et des unités encore plus petites de coraux-skippers, basés sur la lune de Pyria 4, harcelaient les vaisseaux de la Nouvelle République en orbite. Ils avaient même lancé quelques raids risqués contre le complexe de biotique.
Mais ces attaques ressemblaient plus à des tests pour sonder leurs faiblesses qu’à de véritables tentatives de destruction.
Luke Skywalker et Kell Tainer travaillaient sur l’aile X de Luke, réparant les dégâts subis lors de la dernière bataille. Il s’agissait seulement d’égratignures sur la coque et de quelques composants un peu secoués, mais si les problèmes s’accumulaient, le chasseur finirait par perdre de son efficacité.
Tainer était grand et ses muscles ne semblaient pas être là pour faire joli. Il portait une tresse, une moustache et une barbe courte. Sur son front, ses cheveux se clairsemaient. Au premier coup d’œil, on aurait dit un mineur ou un mécanicien de seconde zone… Mais Luke ne se fiait pas aux premières impressions.
— J’avais deviné que vous faisiez partie des renseignements, déclara Luke. Que vous étiez un Spectre.
Un peu de lubrifiant gicla, laissant une trace sur la joue de Tainer. Serrant sa pince sur la conduite perforée, il s’essuya le visage.
— Vous n’êtes pas censé le savoir, dit Kell, d’une voix étouffée.
Il était à demi plongé dans la petite soute du chasseur. On eût dit que le vaisseau le dévorait.
— Maintenant, je vais devoir vous tuer, ajouta-t-il.
— Que faites-vous chez les mécaniciens ? demanda Luke en souriant.
— J’étais mécanicien. J’ai travaillé dans une usine de Sluis Van que les forces de l’Amiral Thrawn ont fait sauter. Mais je pourrais vous demander la même chose. Vous êtes un Maître Jedi. Que fichez-vous chez les mécaniciens ?
— Même réponse, plus ou moins. Je m’occupais de la maintenance sur Tatooine. Et c’est mon vaisseau…
— Sors de là, espèce de… ah. Voilà. Votre mécanisme d’éjection devrait fonctionner. Laissez-moi fixer ce panneau pour que vos pieds ne tombent pas dans la soute.
— Merci. Mais mes pieds ne touchent pas le sol.
Luke démonta sa deuxième soupape, nettoya les conduits et installa une pièce neuve.
Kell glissa hors du compartiment, comme si le vaisseau avait soudain décidé de recracher sa proie. Il atterrit sur ses pieds, avec une certaine souplesse pour un homme aussi fort.
— Vous voulez le tester ?
— Non, merci.
— Allez-y… asseyez-vous et déclenchez le système, c’est le seul moyen d’être sûr qu’il fonctionne.
Luke leva les yeux vers le plafond, cinq mètres au-dessus de sa tête.
— Non, merci.
— Rabat-joie.
Kell attrapa le bord de la coque et se pencha à l’intérieur du cockpit, sa moitié supérieure disparaissant à nouveau.
— Vous êtes marié à Tyria Sarkin, n’est-ce pas ?
— Voilà ! C’est pour ça que vous savez que j’étais un Spectre. Oui, c’est exact.
— Comment va-t-elle ?
Kell garda un long moment le silence.
— Bien… Elle voyage avec notre enfant, Doran, et elle lui apprend les voies des Jedi… Elle est si loin qu’elle ne connaît sans doute pas les derniers rebondissements de l’invasion vong. C’est un peu un mariage à distance. Des séparations alternant avec des retrouvailles enthousiastes. En confirmant son titre de Chevalier Jedi, vous l’avez rendue euphorique pendant des mois. Voire des années.
— Elle le méritait, dit Luke en finissant de fixer le second tube.
Il rouvrit les soupapes. Quand le lubrifiant passa à l’intérieur, le tube se raidit, mais tint bon.
Tyria Sarkin avançait sur une voie solitaire familière à Luke. Il avait suivi la même. Une vingtaine d’années plus tôt, quand il avait rencontré Tyria, il avait testé cette jeune pilote de la Nouvelle République douée pour la Force. A l’époque, il avait jugé ses talents assez faibles. Il lui manquait la discipline nécessaire pour devenir une Jedi. Luke avait suggéré qu’elle se concentre sur son pilotage.
Des années plus tard, Tyria avait démissionné de l’armée. Elle avait appris seule, voyageant et explorant, expérimentant, enquêtant et lisant ce que lui envoyait Luke mais sans passer du temps sur Yavin 4.
Elle n’avait jamais rejeté l’autorité de Luke ni ses conseils, comme Kyp Durron. Seulement progressé à son propre rythme.
Kell se laissa tomber sur le sol.
— C’est fait.
— Ici aussi, ou presque.
Sentant une nouvelle présence, Luke tourna la tête vers l’entrée de la baie pour découvrir Iella Wessiri.
— Trente minutes, déclara-t-elle. Réunion du Cercle Intérieur.
— Le bantha croasse à l’aube, dit Kell.
Iella cligna des yeux.
— Quoi ?
— Vous savez bien. Le bantha croasse à l’aube. Quel est le code ? Ou peut-être n’êtes-vous pas vraiment le chef de section Iella Wessiri ? Retire ton masque, créature, ou j’ouvre le feu !
Iella sourit.
— Mon mari ne m’a jamais dit à quel point vous étiez agaçant. (Elle se tourna vers Luke.) Trente minutes. Il y a du nouveau.
Kell la regarda s’éloigner avec une expression déçue.
— Pas de code. C’est quoi, ce mauvais holopolar ?
— Tu vas faire… quoi ? demanda Mara.
Sa voix n’était pas assez forte pour être audible dans la salle de conférences, juste à côté, mais assez aiguë pour faire sursauter Ben.
Le bébé ouvrit les yeux, gazouilla et tendit les bras vers son père.
Luke lui tendit le petit doigt de sa main non mécanique pour qu’il le serre… Puis il se blinda contre la réaction de sa femme.
— Je vais sur Coruscant.
— Tes visions ?
— Elles sont pires… et plus fréquentes. Ce qui se passe là-bas s’aggrave. Le mal devient plus fort. Ou va devenir plus fort. J’ignore si je vois le présent ou le futur…
— Ou le passé. Tu revis peut-être l’ascension au pouvoir de Palpatine.
Luke secoua la tête.
— Il n’y aurait pas un tel sentiment d’urgence.
— Envoie quelqu’un d’autre. Il s’agit d’une mission de renseignements. Fouiller l’obscurité en silence n’est pas ton fort. Tu es un pilote de chasseur avec une épée qui brille…
— Tu as raison, je devrais peut-être demander à des types des renseignements de m’accompagner. Mais puisque le problème concerne la Force, il faut un Jedi. (Luke lui fit un sourire rassurant.) On a toujours besoin d’un Jedi.
— Où as-tu appris à sourire comme ça ? Avec Yan ? Pas de problème, qu’un Jedi fasse le voyage. Mais pas toi. Tu ne peux pas partir.
— Pourquoi ?
— Parce que je ne peux pas t’accompagner. Je veux rester avec Ben.
— Je dois partir, Mara. La galaxie se désintègre, les Jedi ont besoin d’un leader… Beaucoup pensent que je suis du genre ermite passif et pacifiste, et choisiraient n’importe qui d’autre que moi pour les conduire. Cette mission sur Coruscant me donnera une autre image.
Leia aurait sûrement apprécié le côté politique de la chose. Mais Luke jouait dans la cour de sa sœur… dans un univers où elle était le maître et lui le novice.
— Ne fais pas ça, Skywalker, souffla Mara.
— Je le dois. Viens avec moi.
— On a besoin de moi ici.
— C’est ce que disent tes émotions. Que te souffle la Force ?
Les yeux de Mara lancèrent un éclair.
— Rien.
— C’est que tu refuses de t’ouvrir. Tu as peur d’entendre. Tu crains que la Force te pousse à quitter Ben, au moins de façon temporaire.
Mara ne trahit aucune émotion.
— Je vais te dire de quoi j’ai peur. Que mon mari ne devienne un mystique allumé, coupé de tout sentiment humain.
Luke soupira, abandonnant la discussion.
— L’offre tient jusqu’à mon départ, dit-il en désignant la salle de conférences. Nous devons rejoindre les autres.
Luke s’installa dans son fauteuil, à côté de Wedge. Mara, le visage fermé, s’assit à côté de Yan et de Leia.
Personne ne disait mot. Tout le monde regardait Iella aller et venir devant le mur en brandissant un appareil électronique dont les lampes clignotaient en rythme. Wedge attendit que sa femme ait terminé.
Enfin Iella fit un signe pour indiquer que la pièce était sûre.
— Il y a deux heures, un nouveau vaisseau de réfugiés est arrivé. Il faisait partie d’une flotte se dirigeant vers Hapès… Elle avait été assemblée en secret, mais les Yuuzhan Vong l’ont interceptée et ce navire est le seul à avoir échappé au massacre. Ce qui correspond à une autre information reçue de Talon Karrde, qui affirme que les Vong apprennent à suivre les convois de réfugiés. Je pense que les forces de la Nouvelle République, sous le contrôle direct du Conseil, seront incapables de consacrer leurs ressources à ce problème. C’est pourquoi je vais engager certaines des nôtres. J’attends vos idées.
— La première étape est de déterminer exactement ce que font les Yuuzhan Vong, dit Luke. De comprendre comment ils réussissent à obtenir des informations sur les mouvements de vaisseaux. Peut-être ont-ils infiltré un espion dans le réseau d’exode. Il faut qu’un Jedi se mêle aux voyageurs… et repère quels membres d’équipage sont indétectables par la Force.
— Bien, dit Wedge. Une autre suggestion ?
Au fond de la salle, Danni Quee agita la main.
— Ils utilisent peut-être une créature capable de pister les vaisseaux.
— C’est possible, admit Wedge. Que pouvons-nous faire ?
Danni réfléchit.
— Des créatures traceuses doivent utiliser des fluctuations gravifiques pour signaler leur présence. Je peux construire une unité de détection similaire à celle que j’utilise pour les yammosks. Si nous la montons sur un vaisseau de réfugiés, elle pourrait enregistrer les flux gravifiques et déterminer si une telle créature est à bord. Mais si le vaisseau ne survit pas au voyage et que nous ne pouvons pas récupérer l’enregistrement, ça ne servira à rien.
Corran Horn prit la parole.
— Alors il faut assurer la survie du vaisseau. Préparons une surprise pour les Vong… lançons le vaisseau et ne réagissons qu’au moment de l’agression. C’est tout bénéfice. Les Vong attaquent les vaisseaux de réfugiés… Si leurs bâtiments commencent à disparaître à leur tour, ils repenseront peut-être leurs opérations.
— Bien, dit Wedge.
— Mais si les Yuuzhan Vong ne se servent pas de créatures traceuses, il faudra trouver les failles dans la sécurité du réseau de réfugiés, continua Corran. En résolvant le problème à l’ancienne.
— Nous avons quelques tactiques à notre disposition, dit Wedge. J’ai besoin d’un volontaire pour coordonner ces efforts. Il travaillera avec moi et Tycho pour préparer la mission. Un volontaire ?
A la surprise générale, Lando leva la main le premier.
— Il est temps que je mette les Vong minables, dit-il. A ma manière, bien sûr.
— Bien sûr, répondit Wedge en souriant.
— J’ai besoin de communiquer avec Talon Karrde… et aussi de l’appareil de Danni, d’une escadrille de chasse, peut-être d’un Jedi ou deux et d’un stock de brandy. On sous-estime l’importance du brandy pour la réussite d’une telle mission.
Wedge lui lança un regard étonné.
— Bon… D’accord. Sur ce problème, je pense que nous en avons terminé pour l’instant… Quelqu’un veut ajouter autre chose ?
— Oui, moi, dit Luke en lançant un regard navré à Mara. Je pars sur Coruscant. Quelque chose se passe là-bas, qui n’a rien à voir avec les Yuuzhan Vong. Je dois en savoir plus. Une fois sur place, je trouverai un moyen de quitter la planète. Ce que j’ignore, c’est comment m’y rendre.
— Nos agents des renseignements peuvent vous y conduire, dit Iella. Nous avions pensé envoyer une équipe sur place… Il faut installer des cellules de résistance sur Coruscant. Nous combinerons les deux missions. (Iella eut un regard amusé.) Je t’affecterai le mécanicien agaçant avec qui tu étais tout à l’heure…
— Merci, c’est trop d’honneur, répondit Luke sans sourire.
Vaisseau-monde du Domaine Lah, orbite de Myrkr
Le guerrier yuuzhan vong avait un visage tellement scarifié et tatoué qu’on ne voyait plus ses rides. Son armure en crabe vonduun dissimulait sa maigreur. Dans ses mains, enroulé comme une longue corde, se lovait un bâton d’un genre inhabituel, plus long et plus mince que la version classique.
Les guerriers de son âge étaient rares. La plupart mouraient bien avant.
Le Yuuzhan Vong arpentait sa salle de cours derrière ses élèves placés en rangs, des officiers vêtus de leur seul pagne. Devant eux, des scarabées éclair prenaient la forme d’une planète, avec ses plates-formes de défense, ses écrans et les forces d’assaut yuuzhan Vong.
— Regardez, dit-il. Le quadrant supérieur droit de Coruscant… La ligne de vaisseau contre l’écran, la façon dont elle brille, incandescente avant de disparaître… Ces navires étaient ceux des réfugiés ennemis ; ils ont disparu parce que nous les forcions à se diriger dans une région de l’espace protégée par les défenses passives. Quand les défenseurs n’ont plus pu supporter de voir des innocents réduits en cendres par leurs propres armes, ils ont désactivé leurs protections et nous avons pénétré dans leur sanctuaire. (Les insectes modifièrent leur configuration pour que la ligne de vaisseaux passe à travers l’écran.) Quelle information essentielle était indispensable pour la mise en œuvre de ce plan ?
Silence dans la salle…
Enfin, un jeune guerrier au corps balafré et tatoué se leva. Très rigide, il garda le dos tourné vers son instructeur.
— Nous devions apprendre où étaient leurs défenses…
Le vieux Yuuzhan Vong déroula son bâton et frappa. La pointe s’enfonça dans le dos du guerrier, perçant un trou au-dessus de son omoplate. Le professeur tira sur le bâton comme sur un fouet vivant et le trou saigna.
— Assis, dit-il. Tu viens de recevoir une marque de Czulkang Lah. Plus tard, vous arborerez ces décorations avec fierté. Elles seront le signe que vous avez survécu à mon enseignement. Mais les plus abrutis d’entre vous en auront de nombreuses et au lieu de les honorer, elles montreront leur bêtise… Essayez de les limiter. Qui va répondre à ma question ?
Personne ne se leva.
Le vieux guerrier soupira.
— Que tous se lèvent, à l’exception de celui qui a eu le courage de répondre.
Tous les élèves obtempérèrent, sauf celui qui saignait encore. Czulkang Lah les frappa, méthodiquement, chacun recevant deux blessures. Les guerriers ne criaient pas. Aucun ne laissa échapper autre chose qu’un grognement.
Mais tous se souviendraient de ce jour où la peur de se tromper avait provoqué la colère de leur professeur.
Quand il eut atteint la moitié du groupe, un de ceux qui n’avait pas encore été frappé prit la parole.
— Nous devions être sûrs que nos ennemis sacrifieraient tout pour sauver quelques individus. Nous devions savoir comment ils pensaient.
— Toi, assieds-toi.
Czulkang Lah continua, épargnant celui qui avait parlé.
— Asseyez-vous tous, dit-il enfin. Maintenant, réfléchissez. Tudrath Dyn a raison. Nous devions comprendre leurs faiblesses… et leurs forces. Leur capacité à entraîner de grands guerriers malgré leur peur de la douleur et de la mort. Leur amour des machines… et leur juste évaluation de leur efficacité. Nous devions les connaître. Sinon, nous n’aurions pas pu les battre, ni sur Coruscant, ni ailleurs.
Un guerrier se leva.
— Puis-je poser une question, maître de guerre ?
— Je ne suis pas maître de guerre. Plus depuis longtemps. Mais tu peux poser ta question. Je punis les mauvaises conclusions, pas la curiosité.
— Comment peut-on comprendre les voies d’un ennemi sans apprendre à penser comme lui ? Et si on commence à réfléchir ainsi, ne risque-t-on pas de contaminer ses propres convictions ? N’est-ce pas un danger pour les Yuuzhan Vong ?
— C’est une bonne question. Assis. (Czulkang Lah fit le tour du groupe et se planta devant les jeunes gens.) La réponse est celle que tu supposes. Quand nos tacticiens en viennent à penser comme l’ennemi, ils sont infectés. Si la contamination est trop grave, un Yuuzhan Vong peut trouver le moyen de mourir avec honneur, sachant que son sacrifice a servi notre cause. L’infection d’un Vong n’est donc pas un problème, sauf s’il transmet le mal aux autres. Souvenez-vous que la survie individuelle ne compte pas : c’est cette leçon que l’ennemi n’a pas comprise sur Coruscant. Dès que vous pourrez regarder sans passion ceux que vous envoyez à la mort, vous aurez franchi un pas vers la sagesse stratégique. (Une haute silhouette entra dans la salle, et Czulkang Lah l’interrogea du regard.) Nous en avons terminé. Partez.
Les guerriers se levèrent et sortirent. Tous essayèrent d’identifier le visiteur enveloppé dans une cape.
Quand ses élèves furent partis, Czulkang Lah avança.
— Est-ce toi ?
Tsavong Lah ouvrit sa cape.
— Père.
Czulkang Lah lui fit un signe de tête.
— Fils. A moins que ta visite ne soit pas celle d’un fils, mais du maître de guerre.
Tsavong Lah s’approcha.
— Je viens te voir comme un maître de guerre et comme un fils. Et le fils te demande comment tu vas.
— A ton avis ? Je suis vieux. Sans mon armure, je ne peux presque pas bouger. Je souffre de maux qui n’ont rien à voir avec les marques que je me suis infligées au fil des années… Et je ne suis guère plus qu’un prisonnier ici, incapable de diriger et prié par mon fils de ne pas mourir…
— Les choses ont changé.
— Tu ne veux plus que j’enseigne.
— Je veux que tu diriges.
Czulkang Lah ne cacha pas sa surprise. Il recula comme si un pas en arrière pouvait lui donner une meilleure perspective.
— Je t’écoute.
— Une garnison nous pose des problèmes. Elle défend une planète sur un carrefour hyperspatial important… Borleias, je suis sûr que tu la connais.
— Système de Pyria. Base arrière pour l’assaut de Coruscant.
— C’est ça. La garnison défend la planète avec sauvagerie. Nous ne sommes pas certains de comprendre pourquoi. Nous avons passé au peigne fin une des installations du système occupé : nos ennemis y développent quelque chose, peut-être une nouvelle arme… Mais ils ont réussi à détruire les preuves avant de s’enfuir. J’ai besoin là-bas de quelqu’un qui soit capable d’élucider ce mystère et de détruire la garnison… pour que les souffrances qu’ils nous ont infligées soient oubliées et que les leurs deviennent légendaires.
— Non. Trouve quelqu’un d’autre.
— Pourquoi ?
— Ma victoire me donnera seulement un arrière-goût de ce que j’ai connu. Je refuse… A moins, une fois la mission terminée, que je garde un commandement. Que je puisse retourner à ce que je sais faire de mieux.
Tsavong Lah hésita et Czulkang Lah reprit :
— Tu as peur que je m’attire la fidélité des officiers, de domaines entiers et que je reprenne le rang que tu m’as arraché. Je ne le ferais pas. Je me suis opposé à toi il y a des années, parce que je ne voulais pas venir dans cette galaxie attaquer des infidèles. Mais nous y sommes maintenant. Je n’ai plus aucune raison d’être en désaccord avec toi ou de comploter. Tout ce que je demande, c’est une raison de continuer à vivre.
Son fils hésita.
— Quand Borleias sera tombée, tu garderas le commandement, dit-il enfin, et le récit de tes nouveaux exploits s’ajoutera à ta légende. Prends le Domaine Hul et toutes ses ressources. Attaque le système de Pyria et accomplis ce que je t’ai demandé.
— Ce sera fait, dit Czulkang Lah. (Il garda un moment le silence avant d’ajouter :) Je suis heureux que tu sois venu me poser la question en personne.
— Quels que soient nos différends, tu restes un héros pour les Yuuzhan Vong et pour ton fils. Je ne te dois rien de moins.